mercredi 7 mai 2008

Mai 1968 – Mai 2008, 40 ans de «liberté» d’expression en Tunisie




C'était pourtant en 1968 ...




Comment ne pas reconnaître l’aspect si surprenant de ces séquences d’un reportage tourné il y a 40 ans. Il s’agit d’un échange entre jeunes étudiants Tunisiens sur un de ces sujets si tabou en Tunisie.

Et pourtant … Des décennies plus tard, on s’aperçoit que la capacité des tunisiens à s’exprimer sur leur quotidien, notamment politique, au sein des médias autorisés, demeure toujours aussi stérilisée. La politique s’avère être encore plus tabou que les mœurs. Pour les plus hardis, la malice, parfois d’une rare cocasserie, se substitue aux propos directs pour lâcher ce qu’ils ont sur le cœur. Tous les interstices, surtout sportifs, sont mis à contribution pour repousser les limites de la répression de la liberté d’expression.




Pour les plus hardis, faute de mieux, la malice se substitue aux propos directs...
"Moncef, pourquoi ris-tu ... ti chbiik !"




Le monde a changé et les Tunisiens avec. Et pour les nantis d’entre-eux, avec l’internet, c’est l’accession enfin à un paysage médiatique plus libre, plus ouvert, malgré les blocages de l’ATI.

L’Internet, par le biais de ses canaux libres, a rendu toute forme de censure ou de travestissement de la réalité bête et ridicule à l’image de ses auteurs. Du procès du défunt Moncef Ben Ali si « blackouté », aux documents de la CIA déclassés, en passant par la mise en ligne publique du calendrier des réservations d’espaces publicitaires sur certains quotidiens, jusqu’au déplacement de l’avion présidentiel... tout est aujourd’hui devenu accessible malgré la censure.




Procès de la "Couscous Connection" - JT FR3, novembre 1992



L'Internet a été une bénédiction pour toutes les plumes libres, mais également la malédiction qui a ringardisé, en un laps de temps si court, tous ces imbéciles qui n’ont toujours pas compris qu’à la désinformation, il y a une limite au-delà de laquelle il ne faut pas s’aventurer. Et en l’occurrence, les temps sont loins où l’on pouvait raconter tout et n’importe quoi en jouissant du monopole de la parole publique tout en excluant les contradicteurs de leur droit à la parole. Aujourd’hui, avec ce qui se passe et s’échange sur près de 500 blogs tunisiens actifs, la lutte pour ces imbéciles de la désinformation est devenue inégale. Il n’y a qu'à voir où et sur quels supports les tunisiens se sont informés à propos des derniers événements d’El Redaif .



Blogs Tunisiens - Tunisian Blogs
Près de 500 blogs actifs à l'affut des écarts de Mbarek et ses semblables ...



Bien qu’encore relativement timorés pour certains, les blogs tunisiens n’hésitent plus désormais à clouer au pilori la « presse boudourou » (Presse à deux sous) telle qu'il la qualifient communément.

Cette blogosphère, après une première période marquée par une défiance exacerbée à l’égard de la chose publique, défiance qui fut particulièrement nourrie à l’époque – et non sans arrières pensés - par une première génération de blogueurs, sous le prétexte de ne pas vouloir faire de la politique, va s’enhardir pour remplir ce rôle en matière d’information, qui n’est normalement pas sa vocation naturelle.

En effet, depuis peu on assiste à une inversion de tendance où la réappropriation de l’espace public et la parole qu’elle suppose n’est plus perçue comme une politisation malsaine, mais comme l’exercice d’un droit à l’information et à la parole, y compris lorsqu’il s’agit d’exercer un droit de regard sur la gestion des affaires de la cité. Se faisant, s’est amorcé ainsi ce positionnement de la blogosphère tunisienne en tant que pôle désormais incontournable dans le paysage informatif tunisien. Il faut reconnaître aussi que la langue de bois des médias officiels, les privant de toute crédibilité, va largement contribuer à mettre en avant la blogosphère, non pas uniquement quant à la circulation de l’information, mais également dans la création de l’événement médiatique.

Et à plus forte raison, une troisième étape se dessine par l’arrivée de plus en plus de journalistes professionnels qui ont choisi de contourner la censure par la création de leurs propres pages en ligne. Aux blogs des journalistes pionniers en la matière comme celui de Nadia Omrane, A. Zouri ou de Slim Boukhdir (actuellement emprisonné et son blog hacké depuis), on voit arriver ceux de Soufiane Ben Farhat ou de Zied El Heni. Et au-delà des journalistes, on trouve également d’autres profils à l’image de Kastalli Chérif, lequel, bien que se revendiquant comme un « militant de base au sein du RCD et défenseur acharné du projet de société civile de Ben Ali », n’hésite pas à relever dans le pays du même Ben Ali, que « le journaliste est en train de perdre son statut pour devenir une loque humaine [...] ».

Tout comme ce cadre et exploitant agricole Tunisien, on en dénombre d’autres, issus de diverses branches, lesquels désormais contribuent à créer de l’information sur leurs blogs. Cette même information que les médias locaux censurent, transforment ou, dans le meilleur des cas, ignorent.

La liberté d’expression des Tunisiens s’exerce effectivement sur l’internet. Et plus celle-ci s’exerce, plus les médias officiels dont la parole est toujours aussi lénifiante s'avèrent ringards et surranés. Tout esprit sensé, aurait pu raisonnablement s’attendre à ce que, avec l’apparition du réseau des réseaux, la liberté de la presse en Tunisie évolue un tant soit peu. Il n’en fut rien. Et l’on assiste aujourd’hui à un constat qui fait que l’un des plus anciens journaux de la place « La Presse de Tunisie », l’un des plus tirés autrefois, soit perçu, non pas par la majorité, mais par quasiment l’ensemble de la blogosphère tunisienne comme l’un des summums de la presse lénifiante, pour ne pas dire de caniveaux. Et parmi ceux qui sont perçus comme les grands toccards de ce journalisme tunisien, quelqu'un comme M M, un des redacs chefs du même journal, "La Presse", occupe le haut de cette liste peu glorieuse. Quel gachis !

En ce jour où se commémore la « Journée Mondiale de la Liberté de la Presse », bonne fête à tous les épris du droit à la parole et du droit pour une circulation sans entrave de l’information.

Astrubal,
Centrist
et Malek

Samedi 3 mai 2008
http://www.nawaat.org



1 commentaire:

  1. Anonyme8:39 PM

    http://tunisie-harakati.mylivepage.com

    En Tunisie pour être presque tranquille il ne faut pas toucher à la politique. Les droits communs ont plus de chance de s'en sortir sans séquelle du moment que des directions de prison n'abusent pas de leurs fonctions pour faire le mal, voir le site de Sameh Harakati pour comprendre cette réflexion et découvrir un dossier choc de vérité sur la Tunisie d'aujourd'hui.

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