samedi 7 janvier 2006

Lâcheté, résignation et double pensée



"L'horrible, dans ces Deux Minutes de la Haine, était, non qu'on fût obligé d'y jouer un rôle, mais que l'on ne pouvait, au contraire, éviter de s'y joindre. Au bout de trente secondes, toute feinte, toute dérobade devenait inutile."
G.Orwell, 1984


Il est aisé de comprendre que certains sujets sont difficiles à aborder. Comme il est facilement admissible que faire face à certaines réalités, exige du courage, tout ou moins, une certaine témérité. Mais ce qui est le plus dégradant pour la dignité humaine, plus encore que la lâcheté, c’est de s’y complaire. Quand la lâcheté est revendiquée comme un mode de vie ; Quand elle est érigée en model social ; Quand on arrive à en être fier, plus encore, quand elle devient, pour certains, synonyme de bon sens et de sagesse ! Quand elle devient in fine une philosophie positive de la vie. Que reste t-il, alors, à l’Homme pour continuer à revendiquer la condition de sa naissance : sa condition d’Homme libre ?

Il ne s’agit point de blâmer ceux et celles qui ont choisi la résignation, le fatalisme ou le désintéressement, ni ceux et celles, qui par facilité ou par envie, préfèrent débattre de la pluie et du beau temps. Mais que faire de ceux et celles qui érigent autours d’eux des tours de certitudes, pour ne pas voir leurs conditions réelles ? Que faire, quand la résignation transcende la réalité et la réinvente continuellement, dans une course pathétique derrière une joie de vivre chimérique ? Que faire quand on a, résolument, fait le choix de la double-pensée permanente et particulièrement lorsque celle-ci est utilisée comme technique d’auto- endoctrinement ? Quand la réflexion est marquée par l’acceptation de grosses contradictions et de mensonges éhontés et quand celle-ci s’opère au moyen de la récurrence spiralique de la double-pensée ? Que faire quand on emploie la logique contre la logique dans un combat ou les deux forces protagonistes et au même temps identiques, s’annulent pour plonger l’individu dans le néant intellectuel.

Qui faut-il, alors, blâmer ? Le système, qui, en fin de compte, n'asservit point pour asservir mais pour se perpétuer ? Ou les auto-résignés et plus précisément les plus intellectuellement développés parmi eux, qui par un contrôle strict et permanent de leurs réalités se forcent de se trouver en permanence en conformité avec les orientations et les volontés du système. Que faut-il combattre ? Le pouvoir qui contrôle l'imagination à cause de son pouvoir d’élaboration de vérités parallèles qui sont par nature incontrôlable ? Ou ceux qui par l’autohypnose et l’étouffement délibéré de la conscience, finissent par se rendre incapable d'agir par eux même, et non pas comme une partie indissociable d'autre chose.

En fin de compte, si, on ne sait pas ce que l'on dit au sein de nos sociétés totalitaires, on ne dit pas ce que l'on sait non plus. Les deux acteurs du système sont à blâmer, et les deux sont à combattre ! Ils ne peuvent exister l’un sans l’autre. Ils forment ainsi le miroir déformant de notre réalité artificielle.

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