« For millions of years mankind lived just like the animals.
Then something happened which unleashed the power of our imagination:
We learned to talk »
Pink Floyd
Then something happened which unleashed the power of our imagination:
We learned to talk »
Pink Floyd
a science a longtemps inscrit notre rapport à notre animalité dans une continuité qui s’étend de nos origines animales à notre état évolutif actuel. Or de plus en plus de scientifiques mais aussi de philosophes voient ce rapport, non plus dans la continuité mais précisément dans l'écart nécessaire à nous constituer comme humains. « Ce n'est pas la conjonction de l'homme et de l'animal qu'il faut penser mais leur séparation [1]». Ce qui ferait donc notre humanité, c'est la conscience de ce qui nous différencie de l'animal. Cette recherche de notre « dignité [2] », de notre « conscience de soi », se base sur deux composantes, qui en deviennent fondamentales, qui sont la liberté et la construction de soi faite de questions, d’inquiétudes et de désirs toujours insatisfaits.
La jouissance de la liberté, ainsi que la mise en place de mécanismes de construction de soi, nécessitent la mise ne place d’une construction intellectuelle et donc de prendre le risque d’« être livré à quelque chose qui se refuse ». Henri Laborit[3] définissait la pensée comme irritation, manque d'information et angoisse. En effet, la réflexion provoque une inhibition des mécanismes instinctifs et une « suspension du rapport animal », qui se traduit dans le cerveau par l’inhibition de la réaction immédiate pour introduire des données supplémentaires à plus long terme comme la prise en compte des enjeux sociaux, de l’image de soi, du poids des paroles et du sens…etc. La pensée humaine permet donc de surmonter la fascination animale pour prendre un recul critique et construire une objectivité de la somme des subjectivités du jugement humain.
Ce processus continuel de prise de distance, de rationalisation, d'arrachement à nos fixions et nos préjugés n’est possible que par la réflexion qui constitue un réveil à chaque fois renouvelé de nos rêves imaginaires, des apparences et des projections de nos désirs. L'accession à l'humanité exige un détachement de cette fascination animale, que seul le langage permet en séparant le mot de l'émotion. Seul la parole permet d'analyser sa propre pensée, de l'objectiver, de l'universaliser. L’Homme se trouve donc le lieu d'un conflit, d'un effort perpétuel pour se soustraire des carcans de son instinct animal et s'ouvrir ainsi à la liberté, à la justice, aux possibles et à l'universel, bien au-delà de sa réalité immédiate et prosaïque.
Par ailleurs, si la réflexion et son expression sont inhibitrices de nos instincts archaïques, la confiscation de la parole et l’endoctrinement dans tous leurs aspects sont au contraire les catalyseurs de la régression et du retour à la prédominance de l’instinct sur la réflexion. La résignation, la peur et la violence qui caractérisent nos sociétés modernes, les guerres de territoires ou de dominations qui ensanglantent le monde et la course effrénée pour « la domination de l’Homme par l’Homme », sont, en partie, les conséquences d’une volonté de plus en plus fortes, sous des aspects plus au moins visibles et plus au moins violents, d’un encadrement de la pensée, d’un contrôle de la parole et d’une détermination à imposer une pensée unique de plus en plus restrictive pour la construction de soi.
Pourtant, et encore à ce stade de l’évolution de l’humanité il est encore difficile pour certains d’admettre le caractère fondamental de l’usage de la parole et de l’expression libre de la pensée. L’usage de cette parole salvatrice et humanisante est encore, pour des centaines de millions de personnes à travers le monde, confisqué, contrôlé et censuré. Pire, pour des milliers de personnes, l’exercice de leur humanité traduit par l’expression de leurs pensées est sévèrement réprimandée par la prison, la torture et des fois même la mort. Se qui constitue notre véritable victoire sur notre animalité, est devenue un sacerdoce pour une majorité de ceux qui en usent.
Sami Ben Gharbia, répondant à Hamdi Qindil qui lui demandait pourquoi il blogue, a répondu : « Je blogue pour me réapproprier ma valeur fondamentale : la parole ». Faut-il d’autres raisons pour continuer de parler, d’user de cette faculté, de ce privilège pour exprimer sa pensée pour affirmer à chaque instant son humanité ?
[1] L'ouvert, De l'homme et de l'animal, Giorgio Agamben, Rivages, 2002
[2] Œuvres philosophiques, Jean Pic de La Mirandole, Paris, P U.F., Épiméthée, 1993
[3] Henri Laborit, biologiste, philosophe du comportement animal et du comportement humain
Malek le 27.03.07
La jouissance de la liberté, ainsi que la mise en place de mécanismes de construction de soi, nécessitent la mise ne place d’une construction intellectuelle et donc de prendre le risque d’« être livré à quelque chose qui se refuse ». Henri Laborit[3] définissait la pensée comme irritation, manque d'information et angoisse. En effet, la réflexion provoque une inhibition des mécanismes instinctifs et une « suspension du rapport animal », qui se traduit dans le cerveau par l’inhibition de la réaction immédiate pour introduire des données supplémentaires à plus long terme comme la prise en compte des enjeux sociaux, de l’image de soi, du poids des paroles et du sens…etc. La pensée humaine permet donc de surmonter la fascination animale pour prendre un recul critique et construire une objectivité de la somme des subjectivités du jugement humain.
Ce processus continuel de prise de distance, de rationalisation, d'arrachement à nos fixions et nos préjugés n’est possible que par la réflexion qui constitue un réveil à chaque fois renouvelé de nos rêves imaginaires, des apparences et des projections de nos désirs. L'accession à l'humanité exige un détachement de cette fascination animale, que seul le langage permet en séparant le mot de l'émotion. Seul la parole permet d'analyser sa propre pensée, de l'objectiver, de l'universaliser. L’Homme se trouve donc le lieu d'un conflit, d'un effort perpétuel pour se soustraire des carcans de son instinct animal et s'ouvrir ainsi à la liberté, à la justice, aux possibles et à l'universel, bien au-delà de sa réalité immédiate et prosaïque.
Par ailleurs, si la réflexion et son expression sont inhibitrices de nos instincts archaïques, la confiscation de la parole et l’endoctrinement dans tous leurs aspects sont au contraire les catalyseurs de la régression et du retour à la prédominance de l’instinct sur la réflexion. La résignation, la peur et la violence qui caractérisent nos sociétés modernes, les guerres de territoires ou de dominations qui ensanglantent le monde et la course effrénée pour « la domination de l’Homme par l’Homme », sont, en partie, les conséquences d’une volonté de plus en plus fortes, sous des aspects plus au moins visibles et plus au moins violents, d’un encadrement de la pensée, d’un contrôle de la parole et d’une détermination à imposer une pensée unique de plus en plus restrictive pour la construction de soi.
Pourtant, et encore à ce stade de l’évolution de l’humanité il est encore difficile pour certains d’admettre le caractère fondamental de l’usage de la parole et de l’expression libre de la pensée. L’usage de cette parole salvatrice et humanisante est encore, pour des centaines de millions de personnes à travers le monde, confisqué, contrôlé et censuré. Pire, pour des milliers de personnes, l’exercice de leur humanité traduit par l’expression de leurs pensées est sévèrement réprimandée par la prison, la torture et des fois même la mort. Se qui constitue notre véritable victoire sur notre animalité, est devenue un sacerdoce pour une majorité de ceux qui en usent.
Sami Ben Gharbia, répondant à Hamdi Qindil qui lui demandait pourquoi il blogue, a répondu : « Je blogue pour me réapproprier ma valeur fondamentale : la parole ». Faut-il d’autres raisons pour continuer de parler, d’user de cette faculté, de ce privilège pour exprimer sa pensée pour affirmer à chaque instant son humanité ?
[1] L'ouvert, De l'homme et de l'animal, Giorgio Agamben, Rivages, 2002
[2] Œuvres philosophiques, Jean Pic de La Mirandole, Paris, P U.F., Épiméthée, 1993
[3] Henri Laborit, biologiste, philosophe du comportement animal et du comportement humain
Malek le 27.03.07
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